Cameroun : montée des tensions après une présidentielle contestée

Le climat politique au Cameroun s’est considérablement tendu à la suite de l’élection présidentielle du 12 octobre, entachée de soupçons de fraude massive. Les événements des derniers jours laissent présager une période post-électorale agitée.

Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), parti au pouvoir, a annoncé jeudi qu’un de ses bureaux à Dschang avait été incendié la veille. Des vidéos largement diffusées sur les réseaux sociaux montrent des flammes ravageant les locaux. En réaction, le secrétaire général du parti, Jean Nkuete, a promis des poursuites judiciaires contre les auteurs présumés.

Cette attaque survient dans un contexte de forte contestation, après que le candidat de l’opposition, Issa Tchiroma Bakary, a revendiqué la victoire dès l’issue du scrutin. Il a appelé le président sortant Paul Biya, 92 ans, à admettre sa défaite. Le camp présidentiel a rejeté cette revendication, accusant Tchiroma de vouloir déstabiliser le processus électoral.

Lors d’une conférence de presse mercredi, Tchiroma a dénoncé de nombreuses irrégularités, parmi lesquelles des tentatives de bourrage d’urnes. Ces accusations sont appuyées par des rapports d’organisations de la société civile, évoquant des fraudes dans plusieurs régions du pays.

Le même jour, des manifestations spontanées ont éclaté dans plusieurs villes, notamment à Douala, où des barricades ont été dressées et incendiées. Les forces de l’ordre ont dispersé les protestataires à l’aide de gaz lacrymogènes et de canons à eau. Aucune perte humaine n’a été rapportée, mais une vingtaine de personnes ont été arrêtées pour avoir tenté d’envahir les locaux de l’organisme électoral ELECAM.

Face à l’escalade, le préfet du département du Wouri, Sylyac Marie Mvogo, a appelé au respect des institutions, déclarant : « Nous ne voulons pas que les citoyens se fassent justice eux-mêmes. »

Malgré une opposition fragmentée — onze candidats étaient en lice, et l’un des principaux rivaux a été écarté de la course —, la candidature de Tchiroma, ancien ministre sous Biya désormais passé à l’opposition, a réussi à mobiliser un large soutien populaire.

Au pouvoir depuis 1982, Paul Biya est le deuxième président de l’histoire du Cameroun indépendant. Son long règne est marqué par une gouvernance autoritaire, des affaires de corruption, un conflit sécessionniste dans les régions anglophones et un développement économique ralenti, malgré les ressources naturelles abondantes du pays.

La Cour constitutionnelle doit annoncer les résultats définitifs de l’élection d’ici le 26 octobre, dans un climat de méfiance et d’instabilité croissants.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *