Sénégal–Turquie : un partenariat économique en pleine accélération vers une coopération industrielle renforcée

La coopération économique entre Dakar et Ankara s’inscrit dans une dynamique ascendante, portée par un agenda diplomatique dense et une volonté claire de rééquilibrer des échanges encore largement asymétriques. La visite à Dakar d’une importante délégation turque, conduite par le ministre turc du Commerce, a marqué une nouvelle étape de ce rapprochement. À cette occasion, le ministre sénégalais du Commerce et de l’Industrie, Serigne Guèye Diop, a détaillé les axes majeurs d’un partenariat industriel en profonde mutation.

Une diplomatie économique soutenue depuis 2025

Le renforcement des relations bilatérales s’est accéléré cette année, sous l’impulsion du chef de l’État, prolongée par la visite du Premier ministre en septembre puis consolidée par les échanges menés par Serigne Guèye Diop.
« La Türkiye est fortement engagée à relever les défis économiques avec nous », a-t-il affirmé, saluant la présence à Dakar de 37 chefs d’entreprises turques, preuve, selon lui, de la « vocation partenariale » d’Ankara vis-à-vis du Sénégal.

Cap sur l’industrialisation : zones industrielles, loi réformée et ancrage local

L’enjeu central réside désormais dans la transformation de cet intérêt en investissements industriels concrets. Pour cela, le Sénégal déploie une stratégie articulée autour de plusieurs leviers :

  • promotion des 45 zones industrielles du pays,
  • réforme du cadre réglementaire,
  • introduction dans la future loi sur l’industrialisation d’un quota minimal de participation nationale dans tout investissement étranger.

Objectif : garantir l’enracinement local des projets et créer un tissu industriel durable.

Un signal politique fort : la présence turque à la Fidak

Pour la première fois, le ministre turc du Commerce a participé à l’ouverture de la 33ᵉ Foire internationale de Dakar (Fidak).
Dans la même dynamique, le Premier ministre Ousmane Sonko a reçu, lundi 8 décembre, le vice-ministre turc du Commerce, Özgür Volkan Ağar, venu accompagner la délégation.

Les deux parties ont réaffirmé leur ambition commune : porter les échanges à plus d’un milliard de dollars.

Commerce extérieur : vitalité retrouvée, déséquilibre persistant

Après un net ralentissement en 2023, les échanges ont rebondi en 2024, atteignant 249,1 milliards FCFA.
La Turquie représente désormais 4,8 % des importations sénégalaises, avec 239 milliards FCFA en 2024, contre 176,1 milliards un an plus tôt.

Les importations concernent principalement :

  • produits industriels : fer, acier, fils pour machines, matériaux d’emballage,
  • intrants agroalimentaires (parfums, arômes),
  • pâtes, pâtisseries,
  • produits d’hygiène.

Mais ce dynamisme révèle un déséquilibre structurel défavorable au Sénégal, que le gouvernement entend corriger.

Joint-ventures et PME turques : le pari de la diversification

Pour rééquilibrer les échanges, Serigne Guèye Diop mise sur une stratégie d’intégration industrielle, fondée notamment sur la multiplication des joint-ventures. Le Sénégal souhaite attirer des investissements adossés au tissu extrêmement dense des près de quatre millions de PME turques, afin de diversifier et localiser davantage la production.

Un accord en préparation et une zone industrielle turque envisagée

La révision du cadre juridique d’investissement est en cours.
Une première étape de l’accord sera signée dès demain, avant un dispositif global attendu en mars à Ankara, en présence des patronats et des institutions financières.

En parallèle, le projet d’une zone industrielle dédiée aux entreprises turques est étudié. Cette plateforme pourrait, selon le ministre, créer un véritable « essaim d’abeilles » autour des zones industrielles sénégalaises et accélérer le développement de secteurs clés : agroalimentaire, manufacturier, extractif.


Une collaboration en transition vers un partenariat plus équilibré

À mesure que Dakar et Ankara densifient leurs engagements, se dessine une coopération plus stratégique, plus industrielle et plus équilibrée. Si les ambitions affichées se concrétisent, le Sénégal pourrait consolider son positionnement comme hub industriel régional, soutenu par un partenaire turc en pleine expansion.


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