
Le directeur général de la RTS, Pape Alé Niang, a décidé d’engager un bras de fer avec la Confédération africaine de football (CAF) au sujet des droits de diffusion de la Coupe d’Afrique des nations (CAN). Il conteste la répartition jugée injuste des matchs entre les télévisions publiques africaines et le groupe Canal+, principal détenteur des droits exclusifs.
Lors d’un panel organisé à la Maison de la presse dans le cadre du Salon international des médias, le patron de la télévision publique sénégalaise a dénoncé une situation qu’il juge « inacceptable ». « La CAN est une compétition africaine, une fête du continent. Or, Canal dispose des 52 matchs, tandis que les télévisions publiques n’en ont que 32, pour plus d’un milliard de francs CFA, une somme que l’État supporte puisque la RTS n’en a pas les moyens », a-t-il déploré.
Selon lui, cette politique pousse le public à souscrire aux offres payantes de Canal+ pour suivre l’intégralité de la compétition. Une inégalité d’autant plus flagrante que les chaînes anglophones avaient jusque-là accès aux 52 matchs, contrairement aux francophones. Le Sénégal, avec plusieurs autres pays, a donc pris l’initiative de saisir la CAF par courrier pour réclamer une révision équitable des droits.
Mais la réponse de la CAF est loin d’être celle espérée : plutôt que d’accorder les 52 matchs aux télévisions francophones, elle envisagerait désormais de limiter également les anglophones à 32 matchs, nivelant ainsi par le bas. Cette décision intervient dans un contexte de concentration des médias sportifs, puisque Canal+ a récemment racheté MultiChoice, son principal concurrent sud-africain.
L’ancien directeur de la RTS, Mamadou Baal, modérateur du panel, a apporté un éclairage supplémentaire : « Les droits de diffusion de la CAN dépassent aujourd’hui le milliard, alors que ceux de la Coupe du monde ne coûtent que 300 millions de francs CFA. » Il a appelé les télévisions africaines à boycotter la CAN, rappelant qu’elles sont les seules à la diffuser sur le continent. « Il faut agir ensemble pour faire revenir la CAF à la raison », a-t-il insisté.
Autrefois, selon lui, la retransmission de la CAN ne nécessitait que quelques minutes de publicité pour couvrir les frais. « Tout a changé le jour où la CAF a cédé les droits à un opérateur privé », a-t-il rappelé.
Ce débat, consacré au contenu des télévisions africaines et à la reconstruction du narratif sur l’Afrique, a également permis de soulever des questions plus larges : la coopération entre médias africains, le partage des ressources, et la nécessité de produire des contenus locaux pour raconter une Afrique authentique, loin des clichés véhiculés par les médias étrangers.
